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Des Pénalités en Marché Public

Publié le : 01/05/2022 01 mai mai 05 2022

Auteurs: Michel DARNET, Sylvie GENDRE

La pénalité, dans les marchés publics, est considérée comme une sanction visée dans les documents administratifs contractuels du marché de l’entreprise, généralement le CCAP annexé à l’acte d’engagement, appliquée selon son gré par le maitre de l’ouvrage (pouvoir adjudicateur) de l’opération à l’encontre de l’entreprise, titulaire du marché.

En cas de retard constaté par le maitre d’œuvre dans l’exécution des travaux, il sera appliqué, sur décision du maitre de l’ouvrage, une pénalité calculée selon le barème fixé par le CCAP et le nombre de jours de retard. Elle sera déduite de la situation de l’entreprise ou de son décompte final.

La pénalité a deux fonctions :
  • Une fonction incitative
  • Une fonction réparatrice

1.La fonction incitative

L’objet premier de la pénalité est d’inciter l’entrepreneur à rattraper son retard ou à prendre toutes mesures susceptibles de ne pas aggraver les conditions d’exécution.
Elle est, à ce titre, provisoire et peut être supprimée si la réalisation du chantier rentre dans son cours normal.
L’efficacité d’une pénalité dépend de sa date d’application pour lui conserver son caractère incitatif, donc essentiellement en cours de chantier.

Aussi, la pratique adoptée par certains maitres de l’ouvrage de ne l’appliquer qu’au moment du décompte du marché est à déconseiller : la déduction opérée en fin de chantier peut avoir une incidence financière disproportionné sur le solde du marché et créer un apurement de compte conflictuel qui pourrait être évité par un contrôle permanent d’avancement en fonction des difficultés rencontrées au fur et à mesure de la réalisation.

En effet, la pratique à répétition de sanctions ne peut avoir l’effet dissuasif recherché car le titulaire, en se sachant sanctionné en permanence aura tendance à négliger progressivement la qualité des travaux en cours de réalisation.

Il est indispensable de rester dans une conduite raisonnable et appropriée du chantier en plein accord entre le maitre de l’ouvrage et le maitre d’œuvre.
Il faut également rappeler qu’en dehors des pénalités de retard pour exécution, le CCAP peut prévoir d’autres types de pénalités, notamment pour retard dans la remise des documents par le titulaire (plans et autres), retard dans la levée des réserves, non-assistance aux réunions de chantier.

Il reste que la démultiplication des sanctions sur le titulaire ne peut être de bonnes pratiques en risquant là encore d’entretenir un climat défavorable pendant la durée du chantier, peu propice au maintien de relations de confiance entre les parties et à la qualité de l’ouvrage à réaliser.

2.La fonction réparatrice

La gestion des pénalités par le maitre de l’ouvrage doit parallèlement prendre en compte le risque financier auquel ce dernier peut être exposé à l’occasion des travaux.
La pénalité sera ainsi pour lui une mesure de protection réparatrice d’éventuels dommages dont il sera indemnisé forfaitairement par l’application des pénalités prévues au marché de l’entreprise :
  • Première précaution, il est nécessaire d’assurer le cohérence entre le CCAP et le CCAG marché travaux publics.
Depuis la réforme du code des marchés publics en 2006, le CCAG, pour être opposable au titulaire, doit être visé expressément dans les documents généraux constitutifs du marché. Son application n’est plus systématiquement obligatoire.
Les dérogations au CCAG peuvent être décidées si elles sont mentionnées en fin de CCAP avec rappels des articles du CCAP dérogatoires face aux articles correspondants du CCAG.
  • Deuxième précaution, il est nécessaire pour le maitre de l’ouvrage le sens de la mesure dans l’application et le chiffrage des pénalités au regard des possibilités de contrôle exercées par les tribunaux.
Les juridictions n’hésitent pas aujourd’hui à pratiquer la modulation du montant de la pénalité lorsqu’elle est considérée comme manifestement excessive en fonction du montant du marché concerné et au regard de la part que représente la pénalité appliquée par rapport au montant du marché et de l’ampleur du retard constaté.
Le Conseil d’Etat dans un dossier concernant le Centre Hospitalier Inter départemental de l’enfance s’est prononcé en ce sens (arrêt du 19.07.2017 numéro 39.2707).
  • Troisième précaution, il faut prendre aujourd’hui en considération les nouvelles dispositions du CCAG version 2021 et son article 19 qui fixe les pénalités journalières à 1/3000ème du montant de l’ensemble du marché, avenants compris et la nécessité de ne faire intervenir la pénalité qu’après constatation du retard par le maitre d’œuvre.
Le CCAG nouvelle version retient également :
  • Le plafonnement de l’ensemble des pénalités à 10% du montant du marché,
  • L’exonération du paiement des pénalités harmonisée à 1000 euros.
  • L’obligation pour le maitre de l’ouvrage d’inviter par écrit le titulaire à présenter ses observations sous quinzaine avant toute application de pénalité (article 19.2.4 du CCAG).
Bien entendu, le maitre de l’ouvrage reste libre de déroger à ces nouvelles dispositions dans le cadre du CCAP de l’opération mais son risque est réel d’être sanctionné par les tribunaux dont certaines décisions se sont déjà alignées sur les nouvelles dispositions du CCAG, avant même la date de son entrée en vigueur.

Des 25% parfois adoptés dans des décisions du passé, les Cour d’Appel Administratives ne retiennent plus aujourd’hui que le seuil de 10% (arrêt de la CAA PARIS du 06.07.2020 numéro 18PA04041).

Bien plus dans un arrêt de la CAA de DOUAI du 12.01.2021 numéro 19DA00453, la Cour a été jusqu’à considérer pour des pénalités concernant des réserves non levées après réception que le caractère éventuellement excessif devait être apprécié non en fonction du montant du marché mais uniquement en fonction des seules prestations réservées.

Il est donc recommandé en définitivement que la rédaction du CCAP fasse l’objet de la plus grande vigilance afin d’adopter des mesures parfaitement adaptées à l’importance de l’opération après consultation de la maitrise d’œuvre.

Le Cabinet ATCM avocats reste bien entendu à disposition de chacun pour éclaircissement ou réponse à des cas particuliers.

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